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Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/349

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LA RELIGION DE L’AMOUR ET DE LA BEAUTÉ


Les bienheureuses ténèbres, je crois que c’est le nom qui conviendrait le mieux à la poésie ; car la poésie est comme une nuit bienfaisante, offrant aux âmes la douceur du repos après les fatigues du jour. En elle seulement on se délasse d’avoir vécu. Elle console des recherches vaines, des blessures reçues dans la poursuite d’insaisissables fantômes. La poésie et l’amour sont les deux refuges sans lesquels le monde ne serait pas habitable. Et tous deux ne s’ouvrent point, comme on le croit, aux jeunes gens, mais à ceux qui ont assez d’être jeunes, et de chercher, et d’errer. La poésie et l’amour sont les deux fleurs de la vie : ce sont les deux sources enchantées qui se cachent dès qu’on les cherche, mais qu’il faut aimer sans les voir, jusqu’à ce qu’enfin elles se montrent : car elles seules désaltèrent à jamais.