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Page:Wyzewa - Nos maîtres, 1895.djvu/55

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L’ART WAGNÉRIEN

vie artistique faite d’aventures. Les Anglais, que la contagion cartésienne avait moins atteints, furent les premiers à revenir de cet éblouissement. Le romantique Dickens n’est point plus soucieux que Hugo de l’analyse rationnelle ; mais ses romans recréent une vie plus naturelle, d’événements plus réels et plus simples. À sa suite, c’est Flaubert, ce sont nos réalistes et naturalistes français, qui ramènent le romantisme à créer une vie toujours purement sensible, mais plus normale et plus ordinaire.

Tous restent encore des romantiques, c’est-à-dire des créateurs d’une vie purement sensible, indifférents aux conflits des motifs, aux raisons qui, dans l’àme des personnages, déterminent cette vie. L’analyse psychologique, cependant, n’avait point disparu : ce fut d’abord Henri Heine qui nota, en de languides poèmes, une étrange série d’idées amères et sentimentales. Puis les romanciers russes, Tolstoï et Goncharof, tentèrent une création totale de la vie, ensemble rationnelle et sensible. Leurs héros ont à la fois des âmes et des corps : ils raisonnent, sentent, et agissent.

La littérature française, de son côté, ne nous a point donné encore, malgré d’aimables essais, un romande vie complète, tout ensemble descriptif et psychologique. Mais nos artistes ont, en revanche, perfectionné la forme du roman, l’ont bellement préparée à devenir ce roman attendu. Ils ont simplifié l’intrigue, l’ont réduite à des bornes de temps et d’espace assez étroites pour que les faits y placés puissent être pleinement recréés. Ils ont donné à