Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 1.djvu/434

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porte. Toutefois, je vous promets de vous donner des marques de reconnaissance proportionnées aux avantages que nous remporterons, pendant que nous serons à attendre les fonds de Lacédémone. Mais, avec l’aide des dieux, montrons aux barbares que nous n’avons pas besoin de tomber en admiration devant eux pour nous venger de nos ennemis. »

Quand il a dit ces mots, plusieurs se lèvent, et surtout ceux qu’on accusait d’être au nombre de ses adversaires. La crainte les pousse à fournir les moyens de se procurer de l’argent et à s’engager eux-mêmes en particulier pour une certaine somme. Callicratidas, à l’aide de cet argent et de celui de Chios, donne à chaque matelot cinq drachmes pour la route, et part pour Méthymne de Lesbos. Les Méthymniens refusant de se rendre, vu qu’ils avaient une garnison athénienne et qu’ils tenaient pour le parti athénien, il assiége la ville et s’en empare de vive force. Les soldats pillent toutes les richesses qui s’y trouvent ; mais Callicratidas fait rassembler tous les esclaves sur l’agora, et, malgré les instances des alliés qui veulent faire vendre aussi les citoyens de Méthymne, il déclare que, tant qu’il aura le commandement, il s’opposera de tout son pouvoir à ce qu’aucun Grec soit réduit en esclavage. Le lendemain, il relâche la garnison athénienne et tous les citoyens, et fait vendre tous les esclaves qu’on a pris. Il fait dire à Conon qu’il l’empêchera bientôt d’être l’amant de la mer, et, le voyant mettre à la voile au point du jour, il le poursuit et lui coupe le chemin de Samos, afin qu’il ne puisse s’y réfugier.

Conon échappe avec ses vaisseaux, qui étaient bons marcheurs, vu qu’il avait choisi dans ses nombreux équipages les meilleurs rameurs, dont il avait garni un petit nombre de navires, et se réfugie à Mitylène avec deux des dix stratéges, Érasinide et Léon[1]. Callicratidas, qui le poursuivait avec cent soixante-dix vaisseaux, entre en même temps que lui dans le port. Conon, prévenu dans son dessein par les ennemis, se voit obligé de risquer devant le port un combat naval dans lequel il perd trente vaisseaux : les hommes s’enfuient à terre. Les Athéniens tirent ensuite à sec, sous les murs de la ville, les quarante navires qui leur restent. Alors Callicratidas jette l’ancre dans le port, bloque l’ennemi en en gardant l’entrée, et fait venir par terre une masse de Méthymniens, et par mer des troupes de Chios : il lui arrive aussi de l’argent de Cyrus.

  1. Il faut y ajouter Lysias et Archestrate.