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Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/123

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bataille ; le troisième reste dans le canot. Les canota repartent conduits ainsi par un seul homme. Voici comment les autres se forment : ils se mettent sur plusieurs files, de cent hommes au plus, et se répondant les unes aux autres comme des chœurs. Ils portent tous des boucliers d’osier, couverts de cuir de bœuf blanc garni de poil et ressemblant à une feuille de lierre. Ils tiennent de l’autre main un javelot long de six coudées, armé d’une pointe de fer, et terminé en boule du côté du bois.

Leurs tuniques ne descendent pas jusqu’aux genoux ; elles sont d’une toile épaisse, comme de grosses couvertures de lin. Ils ont sur la tête des casques de cuir à la paphlagonienne, sur le milieu desquels s’élève une tresse en spirale, à la façon d’une tiare. Ils ont des sagaies de fer. Un d’entre eux ayant préludé, ils se mettent tous à chanter, puis, marchant en cadence, passent à travers les rangs des Grecs qui étaient sous les armes, et s’avancent aussitôt contre le poste des ennemis qui paraissait le plus facile à enlever. C’était un lieu en avant de la ville qu’ils appelaient leur métropole, et dans laquelle était la principale forteresse des Mossynèques, cause originaire de cette guerre ; car ceux qui l’occupaient étaient réputés maîtres de tout le pays des Mossynèques. Les alliés des Grecs prétendaient que les autres n’en étaient pas justes détenteurs, et que les possesseurs de cette place les privaient d’autant.

À leur suite marchent, sans l’ordre des stratèges, quelques Grecs attirés par l’espoir de piller. Les ennemis les laissent tranquillement avancer ; mais, quand ils les voient près du poste, ils font une sortie au pas de course, les mettent en fuite, tuent un grand nombre de barbares, ainsi que quelques-uns des Grecs qui les avaient accompagnés, et poursuivent les fuyards jusqu’à ce qu’ils aperçoivent les Grecs arrivant au secours. Alors ils se détournent et battent en retraite, coupent les têtes des morts et les montrent aux Grecs et à leurs compatriotes ennemis, en dansant et en chantant un air national. Les Grecs sont tout affligés d’avoir enhardi les ennemis et d’avoir vu fuir avec les barbares une grande quantité des leurs, ce qui jusque-là n’était jamais arrivé durant toute l’expédition. Aussi Xénophon convoquant les Grecs : « Soldats, dit-il, ne vous découragez point après ce qui s’est passé. C’est un mal pour un bien. D’abord, vous avez appris que les Mossynèques qui doivent nous servir de guides sont réelle-