Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/492

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pour n’avoir rien à risquer. Voilà pourquoi nous avons établi l’égalité entre les esclaves et les hommes libres, entre les métèques et les citoyens. Car, puisque la ville a besoin des métèques pour le grand nombre des métiers et pour la marine, nous avons bien fait, en raison de cela, d’accorder l’égalité aux métèques.

Ici encore, la gymnastique et la musique sont proscrites par le peuple, qui s’imagine que ce n’est pas beau, et qui se sent incapable de s’y appliquer[1]. Pour ce qui est des charges de chorége, de gymnasiarque et de triérarque, c’est l’usage que les riches soient choréges et que le peuple ait la jouissance des chœurs ; que les riches soient gymnasiarques ou triérarques et que le peuple ait la jouissance des trirèmes et des gymnases. Le peuple veut donc gagner de l’argent en chantant, en courant, en dansant, en naviguant sur les vaisseaux, de manière à tout avoir et à appauvrir les riches. Quant aux tribunaux, il se soucie moins de la justice que de son intérêt[2].

À l’égard des alliés, quand il aborde chez eux, il y poursuit les gens de mérite de sa calomnie et de sa haine, mais c’est parce qu’il est convaincu que tout supérieur doit être haï de son inférieur ; que, si on laisse les riches et les puissants se fortifier dans la république, avant peu là souveraineté populaire aura vécu à Athènes. C’est en vertu de ces principes que le peuple dégrade les hommes de talent, confisque leurs biens, les condamne à la mort ou à l’exil, et élève des hommes de rien. Par contre, les gens recommandables d’Athènes soutiennent les gens recommandables des villes alliées, dans la pensée qu’il est de leur intérêt de défendre les premiers citoyens d’une république. On dira peut-être que ce serait une force pour les Athéniens d’avoir des alliés en état de leur fournir des subsides. Mais les démocrates regardent comme un plus grand bien que chaque Athénien personnellement mette la main sur la fortune des alliés, afin que ceux-ci, réduits à ce qu’il faut pour vivre et pour travailler, soient hors d’état de nuire.

  1. Il y a dans les auteurs anciens de nombreux témoignages contraires à cette assertion. Voyez notamment Lucien, Anacharsis, t. II, p. 495 de notre traduction. De Pauw fait aussi observer que les Athéniens étaient confiés, dès leur enfance, à des maîtres d’exercice, nommés pédotribes, et que le premier des arts qu’ils apprenaient était l’art de nager, absolument indispensable dans le service de leur marine militaire.
  2. On trouvera un exposé lumineux de l’organisation de la justice à Athènes, dans de Pauw, t. II, p. 1 et suivantes.