Page:Xénophon - Œuvres complètes, éd. Talbot, tome 2.djvu/73

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« Il me semble donc juste et raisonnable d’essayer, avant tout, de revenir en Grèce et dans nos familles, et là d’annoncer aux Grecs que, s’ils sont pauvres, c’est qu’ils le veulent bien, puisqu’il leur est permis de transporter ici ceux qui maintenant chez eux sont privés de ressources, et de les y faire riches. Car tous ces biens, soldats, attendent évidemment un vainqueur. J’ai maintenant à vous exposer comment nous marcherons avec le plus de sécurité, et, s’il faut combattre, comment nous combattrons avec le plus de succès.

« D’abord, continue-t-il, je suis d’avis de brûler les charrois qui nous suivent, afin que ce ne soient pas nos attelages qui règlent nos mouvements, mais que nous nous portions où l’exigera le bien de l’armée. En second lieu, il faut brûler nos tentes. Elles nous donnent de l’embarras à transporter, et ne servent ni pour combattre, ni pour avoir des vivres. Débarrassons-nous encore du superflu de nos bagages, sauf ce qui est nécessaire à la guerre, au boire ou au manger. : c’est le moyen d’avoir plus de soldats sous les armes et moins de skeuophores. Vaincus, en effet, vous le savez, on laisse tout aux autres ; et si nous sommes vainqueurs, les ennemis deviendront nos skeuophores, croyez-le bien.

« Reste à dire ce que je crois le plus important. Vous voyez que les ennemis n’ont osé reprendre la guerre avec nous qu’après avoir fait main basse sur nos stratéges, convaincus que, tant que nous aurions des chefs à qui nous obéirions, nous serions en mesure de les vaincre à la guerre, tandis que, nos chefs enlevés, l’anarchie nous perdrait. Il faut donc que les nouveaux chefs soient plus vigilants que les précédents, que les soldats soient beaucoup plus disciplinés et plus dociles aux chefs actuels qu’à ceux d’autrefois. En cas de désobéissance, si vous décidez que n’importe qui d’entre vous, alors présent, aidera le général dans la répression, dès lors vous tromperez complétement les ennemis. Car, à partir de ce jour, ils verront dix mille Cléarques au lieu d’un seul, ne permettant à personne d’être lâche. Mais il est temps d’en finir : peut-être les ennemis vont-ils bientôt paraître. Que tous ceux qui trouvent bon ce que je viens de dire, le ratifient au plus tôt, pour qu’on l’exécute. Mais si l’on a un meilleur avis, qu’on parle hardiment, fût-ce un simple soldat : nous sommes tous intéresses au salut commun. »

Ensuite Chirisophe dit : « Eh bien, si l’on a quelque chose à ajouter au discours de Xénophon, il est permis de le dire tout