Page:Yonge - L'héritier de Redclyffe, Vol 1, 1855.djvu/264

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 258 —

le voyaient si triste, ils s’abstenaient de lui en parler. Il était toujours grave quand les autres riaient, comme lors de son arrivée à Hollywell, et il aimait à se promener seul en rêvant. Accoutumé dès son enfance à vivre au milieu d’une belle nature, il lui semblait qu’un paysage pittoresque était un ami et un compagnon, et il aurait été encore bien plus malheureux dans un pays plat et uniforme qu’au milieu des collines escarpées et des vallées profondes. Un travail assidu le soutenait aussi, et les sections coniques lui étaient presque aussi utiles qu’à Laura.

Le dimanche qui suivit son malheur, il voulut aller à l’église à Stylehurst, et non pas à Saint-Mildred avec ses camarades. C’était un dimanche de communion, et il espérait éprouver de meilleurs sentiments à l’égard de Philippe dans le lieu auquel son cousin était si fort attaché. Il s’examina longtemps pour être sûr qu’il n’entretenait pas contre lui de sentiments contraires à la charité. C’était un examen difficile ; les mauvaises passions revenaient toujours frapper à la porte, mais, comme il désirait ne pas les écouter, il sentit qu’il pouvait compter sur l’aide de Celui qui seul était capable de lui faire remporter la victoire. Après le service, il erra longtemps autour de la vieille église, parmi les tombes des parents de Philippe. Il rappela à son esprit les sacrifices que ce jeune homme avait faits en faveur de ses sœurs, et le peu de satisfaction qu’ils lui avaient donné. Il s’expliquait la sévérité et le peu de confiance de Philippe, et sentit qu’on pouvait l’excuser.