Page:Young - Les Nuits, trad. Le Tourneur, t. 1-2, 1827.djvu/40

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Mon âme, comme mes sens, est dans les ténèbres. Daigne, à travers cette double nuit qui l'environne, daigne transmettre jusqu'à elle un rayon qui l'éclaire et la console. Je voudrais, faisant trêve à mes chagrins , éloigner ma pensée du spectacle de mes maux, et parcourir utilement les scènes variées de la vie et de la mort. Sois mon guide. Inspire-moi de grandes vérités. Dirige mes actions ainsi que mes chants. Enseigne à ma raison à discerner le bien; force ma volonté à le vouloir; enchaîne-moi à la vertu, que je m'acquitte enfin avec elle des longs arrérages que je lui dois.
Une heure sonne... Nous ne comptons les heures qu'après qu'elles sont perdues. C'est donc sagesse à l'homme de donner au temps une voix. Le son de l'airain frémissant retentit au fond de mon âme. Si j'ai bien entendu, la cloche a sonné la dernière de mes heures. Où sont maintenant celles qui l'ont précédée ? Elles sont avec les années qui ont vu naître le monde. Ce signal m'annonce qu'il faut quitter la vie. O combien il me reste de choses à faire! mes espérances et mes craintes se réveillent dans le trouble. Tout mon être est en alarmes.