Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/104

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paysans qui nous paraissent les plus intelligents et nous nous entretenons longuement avec ceux qui entendent le français, ce que tous ne font pas, car le langage du pays est un mélange de catalan, de provençal et de français. Ceci, avec l’examen des minéraux (sujet pour lequel le duc de Larochefoucauld aime à nous tenir compagnie, étant lui-même très versé dans cette branche de l’histoire naturelle) et la revue des plantes que nous connaissons, nous fait employer très agréablement notre temps. La course du matin achevée, nous revenons nous habiller pour le dîner, à midi et demi, une heure ; puis on visite alternativement le salon de madame de Larochefoucauld ou celui de la comtesse de Grandval, les seules dames logées assez grandement pour recevoir toute notre compagnie. Personne n’est exclu ; comme le premier soin de tout arrivant est de faire le matin une visite à ceux qui l’ont précédé, que cette visite est rendue, tout le monde se connaît à ces réunions, qui durent jusqu’à ce que la fraîcheur du soir permette de faire une promenade. Il n’est question que de cartes, de tric-trac, d’échecs et quelquefois de musique ; mais les cartes dominent : point n’est besoin de dire que je m’absentais souvent de ces assemblées, que je trouve aussi mortellement ennuyeuses en France qu’en Angleterre. Le soir, la compagnie se sépare pour la promenade jusqu’à huit heures et demie, on soupe à neuf ; ensuite vient une heure de conversation dans la chambre d’une de ces dames, et c’est le meilleur moment de la journée, car la causerie y est libre, vive et pleine d’abandon ; on ne l’interrompt que les jours du courrier, alors le duc reçoit de tels paquets de journaux et de pamphlets que nous devenons tous de sérieux politiques. Tout le monde est couché à onze heures. Dans cet ordre du jour il