Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les appartements en sont vastes, nombreux et bien distribués. J’admirai particulièrement l’escalier de pierre au centre du bâtiment, qui, étant en ligne spirale double, renferme deux escaliers distincts, l’un au-dessus de l’autre, de façon que deux personnes peuvent monter ou descendre à la fois sans se voir. Les quatre appartements des combles, à voûtes de pierre, ne sont pas de moindre goût. Le comte de Saxe en avait transformé un en un charmant théâtre, très commode. On nous montra l’appartement occupé par ce grand capitaine et la chambre où il mourut. Si ce fut ou non dans son lit, c’est un problème laissé, à résoudre aux fureteurs d’anecdotes. Le bruit commun en France est qu’il fut atteint au cœur dans un duel avec le prince de Conti, venu tout exprès, et que l’on prit le plus grand soin de le cacher au roi Louis XV, car son amitié pour le maréchal était si vive, qu’il eût certainement banni le prince du royaume. Plusieurs pièces ont été arrangées au goût du jour, soit par le maréchal, soit par les gouverneurs qui lui ont succédé. Dans l’une d’elles se voit un beau portrait de Louis XIV à cheval. Près du château sont les quartiers du régiment de 1,500 chevaux formé par le maréchal, et que Louis XV lui donna, en fixant Chambord pour garnison, tant que son colonel y résiderait. Il vivait ici sur un grand pied, vénéré de son souverain, comme de tout le royaume. Le château n’est pas bien situé, il est trop bas et sans la moindre perspective ; du reste le pays en général est si uni, qu’il serait difficile d’y découvrir une éminence. De la plate-forme on découvre un horizon dont les trois quarts sont couverts par le parc ou forêt ; le mur qui l’entoure renferme 20,000 arpents remplis à profusion de toute sorte de gibier. De grandes clairières