Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/385

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une heure de conversation. Nous nous mîmes en chemin à travers les montagnes, les sentiers tortueux, les lits de torrents, et nous nous trouvâmes enfin au village de Cassang (Gassin), sur le sommet d’une hauteur et à plus d’une lieue d’où nous devions nous rendre. Les matelots se rafraîchirent ; deux d’entre eux avec du vin, l’autre ne voulut jamais prendre que de l’eau. Je lui demandai s’il se sentait aussi fort que les autres avec ce régime. « Certainement, me répondit-il, aussi fort que tout autre homme de ma taille. » Je serais longtemps, je crois, avant de trouver un marin anglais qui veuille se prêter à l’expérience. Pas de lait ; déjeuné avec du raisin, du pain de seigle et de mauvais vin. On nous avait donné ce village, ou plutôt celui que nous avions manqué, comme très triche en mules ; mais le propriétaire des deux seules dont on nous parla étant absent, je n’eus d’autre ressource que de m’arranger avec un homme qui, pour 3 livres, me mena à une lieue de là, à Saint-Tropez, en faisant porter mon bagage sur un âne. En deux heures je gagnai cette ville, dans une jolie position et assez bien bâtie sur un beau bras de mer. Depuis Cavalero il n’y a que des montagnes couvertes, pour les dix-neuf vingtièmes, de pins ou de misérables arbustes toujours verts. Traversé le bras de mer, qui a plus d’une lieue de large. Les passeurs avaient servi à bord d’un vaisseau de ligne et se plaignaient beaucoup des traitements qu’ils avaient subis, mais en ajoutant que, maintenant qu’ils étaient libres, ils seraient mieux considérés, et que, en cas de guerre, les Anglais se verraient payés d’autre monnaie ; ils n’avaient eu devant eux que des esclaves, ils auraient des hommes maintenant. Débarqué à Saint-Maxime, où j’ai loué deux mules et un guide pour Fréjus. Mêmes montagnes, mêmes solitudes de pins et