Page:Young - Voyages en France en 1787, 1788 et 1789.djvu/68

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était pire que la petite bière. Pas de fermes éparses dans cette partie de la Picardie, ce qui est aussi malheureux pour la beauté de la campagne qu’incommode pour sa culture. Jusqu’à Abbeville, pays uni, mal plaisant, il y a beaucoup de bois, qui sont fort grands, mais sans intérêt. Passé près d’un château nouvellement construit, en craie ; il appartient à M. Saint-Maritan. S’il avait vécu en Angleterre, il n’aurait pas élevé une belle maison dans cette situation, ni donné à ses murs l’air de ceux d’un hôpital.

Abbeville passe pour contenir 22,000 âmes ; c’est une ville ancienne et mal bâtie ; beaucoup de maisons sont en bois et me paraissent les plus antiques que je me souvienne avoir vues ; il y a longtemps qu’en Angleterre leurs sœurs ont été démolies. J’ai visité la manufacture de Van-Robais, établie par Louis XIV, et dont Voltaire et d’autres ont tant parlé. J’avais à prendre ici beaucoup d’informations sur la laine et les lainages, et, dans mes conversations avec les manufacturiers, je les ai trouvés grands faiseurs de politique et très violents contre le nouveau traité de commerce avec l’Angleterre. — 30 milles.

Le 21. — Même pays plat et ennuyeux jusqu’à Flixcourt. — 15 milles.

Le 22 — De la misère et de misérables moissons jusqu’à Amiens ; les femmes sont au labour avec un couple de chevaux pour les semailles d’orge. La différence de coutumes entre les deux nations n’est nulle part plus frappante que dans les travaux des femmes : en Angleterre, elles vont peu aux champs, si ce n’est pour glaner et faner, parties de plaisir ou de maraude bien plus que travaux réguliers ; en France, elles