Page:Yver - Le Mystere des beatitudes.djvu/28

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toujours talonné par le temps. Jean Solème prononça :

— Oui, nous connaissons… L’abbé Naim, hein ?

— L’abbé Naïm, en effet, acquiesça Muzard.

Mais les deux femmes, que la vie parisienne avait pourtant rendues depuis leur enfance fort indifférentes à toute idée religieuse, avaient eu, à ce mot de saint, le même tressaillement de curiosité.

— Un vrai saint ? demanda Rosine Nassal.

— Un vieux curé à cheveux blancs ? interrogea Huguette Gérard.

— Non, dit Muzard, un jeune prêtre à barbe noire.

— Est-ce qu’il fait des miracles ? questionna encore Huguette.

Mais, agacé, Muzard négligea de répondre. Au bout de quelques minutes seulement, il répondit :

— C’est lui qui, sans discours, sans théories, sans paroles, par le seul spectacle de sa vie, m’a appris tout ce que je viens de vous dire, et bien d’autres choses encore. J’ignore toujours s’il y a un bon Dieu, si le monde s’est fait tout seul, si l’au-delà existe. Mais j’ai vu un homme lumineux, dont tous les actes sont une leçon, dont tous les gestes répandent du bonheur, dont tous les regards sont de la bonté vivante. J’ai vu un homme qui devine, qui sait, qui comprend, qui pardonne ; j’ai vu un homme qui aime et j’ai eu