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Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/34

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bien clore le bec aux maladroits. Je vous entends encore me « sonner » de votre air illisible en prononçant : « Soyez tranquille, je ne recommencerai pas ! »

— Ah ? demanda Geneviève, qui avait repris son léger sourire affectueux. Je l’ai bien dit ?

— D’une façon cinglante. Un petit coup de cravache, là, vlan ! On le sent passer… Dites, mademoiselle Braspartz, voulez-vous me pardonner mon incorrection de l’autre jour ?

Ils étaient seuls maintenant dans la grande galerie vitrée ; la dernière dactylo venait de fermer la porte pour s’en aller déjeuner.

— J’ai peur de vous en vouloir encore un peu, dit la jeune fille, loyalement.

Il réfléchit une seconde :

— Écoutez, en ce moment, il est midi un quart, ma mère m’attend pour déjeuner et vos parents vont s’inquiéter de votre retard. Mais accepteriez-vous de prendre une tasse de thé avec moi rue de Rivoli, en sortant du bureau ?

Avant de répondre, Geneviève fixa sur son camarade ses beaux yeux bruns doux et luisants pour une dernière interrogation. Jouaient-ils le jeu de deux jeunes êtres qui se recherchent pour des plaisirs intellectuels ? Était-ce plus encore ? Quelque chose de plus mystérieux, de définitif, d’éternel ? Rousselière aussi la regardait, attendant avec anxiété son acceptation ou son refus. Il craignit le refus, s’imagina qu’elle allait dire non et que tout serait fini entre eux. Une petite larme se forma presque imperceptible au coin de ses yeux vifs de Provençal qui la dévoraient.

— Eh bien ! oui, certainement, dit-elle de cet air bon garçon qu’elle prenait souvent avec ses collègues sympathiques. À ce soir !

Et, sur une poignée de main assez brutale, ils se séparèrent.