Aller au contenu

Page:Yver - Madame Sous-Chef.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

de maman, — je voudrais vous amener un soir à la maison.

— Ce soir, si vous voulez, dit Geneviève.

Dix minutes plus tard, Mme Rousselière, la veuve du félibre, avait la surprise d’ouvrir la porte à cette grande Braspartz dont son fils lui rebattait les oreilles et qu’elle reconnut sans hésiter. Elle l’enveloppa d’un regard rapide, très pénétrant et, avec son originalité de Méridionale sans détour

— Eh bien ! il avait raison, mademoiselle ! Vous êtes charmante, et plus encore que je n’osais le croire. Soyez la bienvenue dans ce qui reste ici de la maison des Rousselière. Vous y serez aimée.

Geneviève, accoutumée à la réserve bretonne, qui semble toujours à court de mots pour exprimer ses profonds et durables sentiments, fondait de joie à la chaleur d’un tel accueil. Gênée par ce rôle de bru future qu’on présente, elle but du thé que Mme Rousselière improvisa, goûta ses gâteaux à l’angélique et au miel tout en expliquant à cette mère passionnée qu’au ministère elle remplissait les mêmes fonctions que son fils, mais dans un service différent.

— Ce qu’elle ne vous dit pas, ajouta Denis, c’est qu’elle est inscrite au tableau d’avancement pour passer sous-chef, alors que votre fils n’a jamais été fichu d’y faire mettre son nom. Vous l’y remplacerez, mon chéri, et tout s’arrangera !

Geneviève dressa la tête, ne comprenant pas cette phrase ambiguë. Il y eut un petit silence dans l’étroit salon où la bouilloire du thé chantonnait sur le poêle de faïence provençal et où les lampes voilées répandaient un silence plein de douceur. Au mur, des paysages dorés de soleil, pris dans certaines montagnes affreusement arides des Alpes-Maritimes, évoquaient la vie passée de cette femme,