Page:Yver - Mirabelle de Pampelune.djvu/209

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On bourrait des pipes, on déployait les journaux de Paris qui arrivaient tard dans cette ville maritime, on lisait tout haut les communiqués de la guerre, on discutait l’action des alliés, l’infamie des Boches, et l’époque probable du départ vers le front.

L’adjudant Matheau n’avait pas toute sa vie porté la vareuse au galon d’argent. C’était tout simplement un écrivain de Paris qui venait de s’engager. Et ses hommes l’écoutaient, parce qu’il savait lire les articles du journal et en causer ensuite. Nénette entendait le ton de sa voix monter quand il parlait des Boches, de la tranchée, des obus de 75. Elle ne comprenait pas tout, mais les mêmes termes souvent répétés commençaient à prendre pour elle un sens intrigant. Et puis le mot de partir, qui revenait sans cesse aux lèvres de l’adjudant avec un accent singulier de fièvre, de désir, l’excitait sourdement. Partir ! Nénette savait très bien ce que cela signifiait. Une impatience naissait en elle. Nuit et jour elle était sur le qui-vive.

Parfois, à deux heures du matin, un grand