Page:Yver - Un coin du voile.djvu/134

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même me le dira. Elle-même jugera si elle peut s’appeler madame Vergeas, ou si elle doit, pour ne pas torturer davantage un cœur d’homme si épris d’elle, s’en aller discrètement, éviter celui auquel elle ne peut lier sa vie, se faire oublier… Vous ne protestez pas, mademoiselle ?… Alors, c’est vrai… Mais laquelle de vous… Je vous regarde… vous me semblez si noble…

Plusieurs minutes Johannah resta muette. Elle revoyait sa chérie couchée si blanche sur son lit de mort, et le char drapé de blanc cahotant par la ville, sous le ciel pur, avec la piété de la foule le submergeant du plus glorieux honneur qu’un être humain puisse recevoir. Sa morte de ce matin, sa chère morte triomphante, restée dans les souvenirs en vision immaculée, enfouie là-bas, au cimetière, sous une neige de fleurs blanches, un seul mot de sa bouche pouvait en profaner la mémoire !…

— Je quitterai l’hôpital, madame, dit-elle à la fin, en rougissant.