Page:Yver - Un coin du voile.djvu/211

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noir l’habillait si parfaitement, et ses yeux superbement intelligents possédaient tant de bonté que le jeune juge se dit sans songer : « Voilà une femme exquise. »

Elle soutenait à son bras un grand vieillard qui lui ressemblait. Il était beau comme elle, marchait péniblement. Elle en prenait mille soins.

Il la revit presque chaque jour promenant le vieillard, tantôt sur le quai de la petite rivière, tantôt sur la place de la Sous-Préfecture, qui était entourée de sycomores en rectangle. Elle allait à petits pas. Le vieux monsieur demeurait toujours silencieux. La jeune fille regardait loin devant elle, les prunelles mélancoliques et désabusées. Le juge s’informa d’elle. C’était la fille de ce grand vieillard, un industriel ruiné que la perte de ses biens avait si cruellement atteint qu’il en était demeuré hémiplégique. Ils habitaient un second étage près de l’ancien château, dans la ville basse. On les disait dans une situation précaire.

Ces renseignements attristèrent le jeune homme. Il rêvait d’un bel avenir, désirait un