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Page:Yver - Un coin du voile.djvu/249

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» — Je vous étonne : j’entends cette sentence-là trop froidement…, si vous saviez ce que j’ai souffert, si vous pouviez avoir idée des larmes que j’ai versées, vous comprendriez que j’ai droit à une sorte d’impassibilité devant ce qui se passe. Je suis une insensible. Que ce qui doit être arrive. Tout m’est égal…

» Elle me fit peur. Je sentais que cette vie entre ses mains ne pesait plus rien. Je lui dis :

» — Songez que vous avez là un mourant. Soyez bonne… et si tantôt vous le voyez plus mal, envoyez-moi chercher. J’essayerai d’une ponction.

» Je partais inquiet, revoyant toujours ce flamboiement tragique qui avait couru sur son visage quand elle avait dit : « Tout m’est égal ! » Je savais qu’un acte mauvais, elle ne l’accomplirait pas ; mais il y avait les subtiles négligences, les oublis, les lenteurs à peine voulues dans les soins à donner… L’antipyrine, elle pouvait ne pas l’offrir à temps ; la ventouse qui délivre le poumon, elle pouvait ne pas la mettre, car enfin, si le misérable allait guérir…

» Le soupçon me devint intolérable. J’ai cou-