Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/218

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bien haute noblesse, puisque ses laquais eux-mêmes sont titrés ! » Pardonnez-moi, mon cher monsieur, c’est votre air qui m’aura trompé !

— Vous ne m’avez pas offensé, dit simplement Lanterne. Mais laissons cela. J’allais justement souper, monsieur Cogolin. Et puisque vous avez gardé un si bon souvenir de notre première rencontre à l’office des Trois-Monarques, faites-moi l’amitié de me tenir compagnie à table ce soir encore.

— Je le savais bien ! s’écria Cogolin.

— Plaît-il ? fit Lanterne.

— Rien. C’est un cri du cœur. De temps à autre, il faut que mon cœur crie quelque chose. Je sors de table, mon cher de Lanterne. Mais, pour le plaisir et l’honneur d’être votre commensal, ma foi, je souperai deux fois de suite.

— Moi, dit Lanterne, un soir, j’ai soupé trois fois. Je vous raconterai cela à table, car j’aime les récits de beaux faits d’armes.

— Peste ! Vous m’en faites venir l’eau à la bouche. Mais, sans indiscrétion, où souperons-nous s’il vous plaît ? Est-ce à l’office de M. de Cinq-Mars ?

— Non, dit Lanterne, qui, depuis quelques instants, s’était remis en route. Ce soir, je suis en mission, et c’est même pour cela que je soupe si tard, ce qui est tout à fait contre mes habitudes. Je ne sais si vous êtes comme moi, mais j’aime la régularité des repas.

— Et moi, donc ! Je l’adore, la régularité. Mais la coquine ne peut me sentir. Ce sera donc en quelque taverne que nous souperons ? ajouta Cogolin, déjà inquiet. Mais tous les bouchons sont fermés.

— Oui, dit Lanterne, mais la rôtisserie où nous allons s’ouvrira pour moi. Monsieur Cogolin, nous souperons à la Sarcelle d’Or, dans la rue des Barrés."

Cogolin sursauta.

"Oh ! pensa-t-il, est-ce que ceci serait la suite de l’aventure que j’ai eue avec le sieur Laffemas ? – La rue des Barrés, reprit-il. Est-ce loin ? C’est que je ne connais pas Paris comme vous, moi.

— Il est de fait que je connais Paris. Voici près d’un mois déjà que j’y suis. Car vous saurez que, parmi cinquante serviteurs, c’est moi que le vieux marquis a choisi pour venir à Paris avec son fils, mon maître. Mais nous arrivons."

En effet, quelques minutes plus tard, Lanterne frappait à la porte de la Sarcelle d’Or, et, selon sa promesse, non seulement cette porte s’ouvrit, mais encore l’hôtesse, qui paraissait l’attendre, lui désigna une table et lui demanda ce qu’il voulait boire.

"Boire et manger, dit Lanterne, car j’ai faim et soif. Et voici monsieur qui est comme moi."

Cogolin ouvrait les yeux et les oreilles. Cependant, tout en se