Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/224

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Capestang se mit à trembler convulsivement, et murmura :

"Je suis perdu !"

Et tout à coup, par une de ces sautes que nous avons observées, il se redressa, flamboyant, avec un de ces grands gestes d’héroïque folie. Le chevalier de Capestang eut un éclat de rire et prononça :

"Bah ! J’en serai quitte pour me tuer, voilà tout.

— Vous ne vous tuerez pas !" murmura derrière lui une voix douce et impérieuse à la fois.

Une volte-face effarée – et Capestang se vit en présence d’une femme qui le regardait, souriante, à peine visible dans l’obscurité. Malgré le somptueux costume qu’elle portait, il la reconnut.

"La fée de Meudon !" balbutia le chevalier.

Par où était-elle entrée ? par quelle porte dissimulée ? Hors de lui, la cervelle enfiévrée de rêve, Capestang eût admis l’irréel réalisé sous ses yeux. Doucement, elle lui prit la main, et plus doucement, lui parla :

"Si vous vous tuez, qui protégera ma fille et la sauvera ?

— Votre fille ! palpita le chevalier.

— Giselle ! dit Violetta.

— Giselle ! murmura Capestang ébloui, éperdu. Et vous dites que je dois la protéger ! la sauver ! moi ! Ah ! madame, je vous en supplie, expliquez-moi.

— Silence ! ordonna Violetta. Écoutez..."

Elle mit un doigt sur ses lèvres, et du regard désigna la porte qui communiquait avec le salon. Là, en effet, on parlait, Capestang reconnaissait les voix et voici ce qu’il entendait :

"Eh bien ! disait la voix joyeuse du duc d’Angoulême, puisque nous sommes tous là, futurs conjoints, témoins, et parents ou leurs représentants, lisez-nous vos actes, monsieur Prément de Prémentin. Après quoi, ce salon, d’étude qu’il est, deviendra chapelle, et vous céderez la place au digne curé de Saint-Paul, qui est des nôtres et consent à venir officier ici.

— Le mariage ! rugit en lui-même Capestang, désespéré. Le mariage de Giselle et de Cinq-Mars !"

Le notaire, déjà, procédait à l’appel des divers personnages réunis dans le salon. Successivement, le duc d’Angoulême en qualité de père de la fiancée, le duc de Guise représentant le père du fiancé, puis les témoins répondirent et affirmèrent leur présence. Le notaire, alors, appela :

"Haute et puissante demoiselle Giselle, fille unique de monseigneur Charles, comte d’Auvergne, duc d’Angoulême.

— Me voici, monsieur ! répondit la voix étrangement vibrante de Giselle.

— Henri de Ruzé, seigneur d’Effiat, comte de Cinq-Mars ?

— Me voici, monsieur ! répondit la voix sourde et tremblante du fiancé.