Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/344

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Il parlait correctement l’italien et le français ; mais il était d’humeur taciturne, et toutes les fois qu’il pouvait remplacer la parole par un geste ou un signe, il en montrait sa satisfaction par un large sourire qui faisait étinceler le pur ivoire de ses dents. On le voyait généralement adossé à un encoignure de la grande porte de l’hôtel, les paupières à demi closes, nonchalant, dédaignant de paraître remarquer la curiosité des passants, rêvant au pays des grands soleils, aux sombres et vastes forêts, aux brousses sauvages où s’était écoulée en liberté sa première enfance.

Belphégor avait donc de ces rêveries que doivent avoir les lions capturés au désert et amenés dans des contrées où ils meurent lentement de nostalgie. De ces grands fauves aussi, il avait l’âme primitive, douce ou terrible – sans qu’on pût le croire responsable ou de la douceur ou de la férocité.


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Ce n’était pas la première fois, sans doute, que Belphégor faisait manœuvrer l’effroyable mécanisme que nous avons tenté de décrire. D’ailleurs la manœuvre était simple.

Après avoir attaché Capestang à la planchette, après lui avoir fait respirer un parfum révulsif destiné à dissiper instantanément sa torpeur, Belphégor était sorti, comme on l’a vu, et, montant un escalier d’une douzaine de marches, était entré dans une pièce ronde, exactement pareille à celle où se trouvait le patient.

L’extrémité supérieure de ce cylindre énorme que Capestang avait d’abord pris pour un pilier et qui était une vis, aboutissait là, et dépassait d’une demi-toise le plancher. Là, soit adaptés au cylindre de fer, soit adaptés aux murs, il y avait plusieurs leviers. Belphégor poussa quatre de ces leviers ; c’était pour mettre en action le plancher de la pièce où se trouvait Capestang – pour faire le vide au-dessous de lui. Il poussa ensuite deux leviers adaptés au cylindre : c’était pour faire descendre l’écrou.


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Belphégor, ayant mis le mécanisme en mouvement, s’assit sur escabeau. Une minute, la tête penchée sur ses genoux, il écouta. Un frisson qui courut le long de son échine indiqua qu’il avait conscience de la fantastique horreur de ce qui devait se passer au-dessous de lui. Mais bientôt il tomba dans une méditation si profonde qu’il en oublia tout, que rien n’exista plus pour lui, sinon un mot, un simple mot qu’avait prononcé Léonora Galigaï. Et il murmura :