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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/528

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écarta violemment de son esprit l’idée de son père et de sa mère entraînés dans le carrosse au Louvre - ainsi qu’elle l’avait entendu crier. Elle écarta du même rude effort la pensée de Capestang, qui se présentait à elle dans cette minute. Et elle réduisit toute la situation à ce problème :

"Que faire pour ne pas tomber vivante au pouvoir de Concini ?"

Du côté du parc, soudain, une rumeur ! Concini et ses cavaliers envahissaient le parc ! Ils attachèrent leurs chevaux à un bouquet d’ormes et marchèrent à l’assaut du perron !

Du côté de la route, les coups de madrier, les coups sourds et puissants se succédaient. Giselle entendit un craquement du bois qui se déchire ! Elle frémit. Presque au même moment, elle entendit qu’on heurtait violemment à la porte du côté du parc, et une voix rauque, haletante, gronda d’un étrange accent d’amour, un accent de mort :

"Ouvrez ! De par le roi !"

Giselle frissonna. Un cri, tout à coup, jaillit de ses lèvres blanches. Elle avait trouvé ! C’était effroyable, ce qu’elle avait trouvé. Mais c’était sûr ! C’était la mort certaine !

Giselle, en bonds désespérés, revint vers le centre de l’habitation, et gagna cette pièce où Capestang avait trouvé toute une série de costumes de l’un desquels il s’était emparé. Cette pièce, ce n’était pas seulement le vestiaire des conspirateurs. C’était leur arsenal. De vastes placards étaient pleins de mousquets. Un cabinet voisin contenait douze tonnelets de poudre.

De la poudre ! C’était cela que Giselle avait trouvé pour mourir !

La pensée exorbitée, l’âme haussée aux solutions qui déroutent le spectateur, elle vivait une minute de folie ou d’héroïsme extrahumain. De ses mains fines et délicates, de ses mains déjà ensanglantées par le travail de la barricade, Giselle déplaça, souleva, roula trois de ces tonnelets. Dans un placard, elle saisit une hache, et alors, aux coups des assaillants répondit le bruit de la hache défonçant l’un des tonneaux ! La poudre se répandit. Sur cette poudre répandue, elle plaça les deux autres tonnelets... Et alors, elle alluma un flambeau ! Ce flambeau, elle alla le placer sur la cheminée, en passant sur la poudre qui craquait sous ses pas ! Et pour la deuxième fois elle sourit. Elle n’avait qu’un geste à faire pour entrer dans la mort libératrice !

Alors Giselle, toute pantelante, s’appuya au marbre de la cheminée. Sa pensée prononça un suprême adieu pour sa mère. Et, à cet instant seulement, elle s’accorda comme un repos dans la bataille, de vivre dans l’amour ses dernières minutes de vie.

Giselle, près de la poudre, près du flambeau, près de la mort, Giselle tira de son sein un papier fripé, usé, qui était là, sans doute, caché depuis longtemps... Et, de ses yeux emplis d’