Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/64

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

réveilla, je le vis venir à moi, il riait, il grondait des paroles que je n’entendais pas, il flamboyait, et moi, glacée, je ne pouvais ni jeter un cri ni tenter un geste. Dans le même instant, Concini me saisit les deux mains… et le nain, l’affreux nain était là qui me regardait et riait.

— Oh! l'infâme ! l'infâme ! haleta Giselle. Mère ! par pitié, taisez-vous !

— Le voici ! cria Violetta d’une voix d’épouvante. À moi, Charles !"

La pauvre créature se jeta à bas de son lit avec un cri terrible. Et alors, ce fut la lutte affreuse de la folle contre un assaillant imaginaire ; alors, pantelante, les cheveux en désordre, les yeux exorbités, Violetta, en proie à une crise d’une violence qui épouvantait Giselle, se roula sur le parquet, se tordit, cria, supplia, menaça, et enfin, brisée, couverte de sueur, s’affaissa, prostrée, sans souffle. Avec la force du dévouement filial, Giselle parvint à la replacer sur son lit, la prit dans ses bras, et longuement, doucement, se mit à la bercer comme une enfant.

Les heures s’écoulèrent. La pièce, maintenant, était plongée dans les ténèbres, le silence était profond. Le sein de Violetta, d’un mouvement doux et uniforme, se levait et s’abaissait, sa physionomie avait repris une expression de vague bonheur. Paisiblement, Violetta dormait dans les bras de sa fille. Alors Giselle déposa un long baiser sur le front de sa mère et sortit sur la pointe des pieds.

Le duc d’Angoulême était parti pour la réunion des conjurés. Giselle, calme et attentive, s’occupa de tout préparer pour son retour, donna les ordres nécessaires aux deux domestiques de la maison, et, installée dans une salle du rez-de-chaussée, attendit l’arrivée de son père et de ses invités, le duc de Guise et le prince de Condé, afin de leur faire les honneurs. Et comme sa pensée repassait les événements de ce jour, comme, une fois encore, elle cherchait à revoir lucidement dans son esprit celui qui l’avait sauvée, peu à peu, ses yeux se fermèrent, et elle aussi, dans le fauteuil où elle attendait, s’endormit.

Tout à coup, comme dans le récit de Violetta, le bruit d’un vitrail qui saute en éclats. Tout à coup, la fenêtre qui s’ouvre violemment ! Tout à coup, aux yeux de Giselle soudain réveillée, un homme qui s’avance ! Et, comme dans le récit de sa mère, cet homme qui vient à elle, le rire aux lèvres, le regard flamboyant, cet homme, c’est Concini ! Derrière lui, deux acolytes sautent dans la salle. En même temps, dans l’antichambre, un bruit de lutte, les cris des valets.

Et Giselle, pétrifiée, glacée, comme dans le récit de sa mère, Giselle a vu venir l’homme, sans pouvoir faire un geste de défense, l’horreur la paralyse, sa pensée est en proie au vertige de l’épouvante… seule, une clameur désespérée, qui, par