Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/68

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Mais alors, ayant baissé les yeux vers le sol, il frissonna : il vit que toute tentative de fuite était impossible sur ce toit à angle aigu où aucune aspérité ne permettait de s’accrocher, Capestang vit, qu’il se trouvait à soixante pieds des pavés d’une courette située sur les derrières de l’hôtel de Concini, c’est-à-dire qu’il n’avait qu’un moyen d’éviter l’agonie par la faim et la soif : c’était d’agrandir le trou, de se laisser tomber, et de se fracasser le crâne sur ces pavés !

"Eh bien, soit ! fit-il. Il ne sera pas dit qu’un Trémazenc de Capestang se sera laissé mourir comme un renard qui n’ose sortir du terrier, alors, que, vive Dieu ! je puis encore choisir la mort qui me convient ! Non, ruffians ! non, sacripants, vous n’aurez pas cette joie de ramasser mon cadavre ! Un Capestang sait mourir comme et quand il lui plaît, et braver encore en mourant la mort et la guigne !...

— Hein ?" dit pour la troisième fois la voix mystérieuse.

Et cette fois, Capestang l’entendit, l’étrange voix nasillarde qui jetait ainsi dans l’espace cette exclamation à la fois interrogative et stupéfaite. La voix, disons-nous, claironnait dans l’espace. Un instant, il lui sembla voir devant lui, dans l’espace, une tête étrange, pâle, grimaçante, et remarquable par sa complète calvitie.

"C'est l'ange de la pluie", fit-il.

Cependant il vit que, devant lui, la courette en question était fermée par une haute muraille sans aucune fenêtre ; mais cette muraille elle-même était surmontée d’un toit aigu, et vers le milieu de ce toit s’ouvrait une étroite lucarne. Ce fut à cette lucarne que ses yeux finirent par s’accrocher.

"Hein ?" fit-il à son tour avec étonnement.

En effet, cette lucarne encadrait une tête, – une tête ornée d’une énorme chevelure. Cette tête ouvrait des yeux effarés. Et ces yeux le fixaient avec une stupeur que Capestang prit pour de l’insolence, car, oubliant sa terrible situation, il se mit à vociférer :

"Dites donc, monsieur l’impertinent...

— Plus bas ! interrompit la tête.

— Comment, plus bas ? fit Capestang. Qu’est-ce à dire, monsieur le faquin ?

— Parlez plus bas, mon gentilhomme ! Eh quoi ! ne me reconnaissez-vous pas ?

— Si je vous reconnais ? Je vous connais donc ? Au fait, il me semble avoir déjà vu ce nez pointu, cette bouche fendue jusqu’aux oreilles, ces yeux ronds et cette extravagante chevelure. J’y suis, corbacque ! J’y suis, et je te maudis, puisque, en te rencontrant, je me suis heurté au malheur ! C’est bien toi qui t’appelles Laguigne, que la peste étouffe !

— Pardon, mon gentilhomme, dit la tête de la lucarne, je ne m'appelle pas Laguigne. Aujourd'hui, je m'appelle Lachance.