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Page:Zévaco - Le Capitan, 1926.djvu/81

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— Bon, bon. Vos armes ?

— Les vôtres ! dit Capestang.

— La rapière et le poignard, alors !

— Soit ! Pourvu qu'elle pénètre, toute arme est bonne.

— L'heure, maintenant. Cet après-midi, à trois heures ?

— À merveille ! dit Capestang.

— Derrière les jardins de monsieur le duc de Luxembourg ?

— Va pour les jardins."

Le marquis salua et dit :

"Monsieur le chevalier de Capestang, j’aurai l’honneur de vous attendre avec mes témoins à trois heures de ce jour derrière les jardins de M. le duc de Luxembourg, pour vous y combattre par la rapière et le poignard."

Capestang rendit salut pour salut, et dit :

"Monsieur le marquis de Cinq-Mars, à l’heure et au lieu dits, avec les armes que vous dites, j’aurai l’honneur de me rencontrer avec vous."

Les deux jeunes gens, de nouveau, s’inclinèrent et, en se redressant, ne purent s’empêcher de s’admirer l’un l’autre.

"Il est gentil, ce marquis !" songea Capestang.

"Il est merveilleux, ce capitan !" songea Cinq-Mars.

Et comme le chevalier se dirigeait vers la porte, le marquis s'écria :

"Puisque nous ne devons nous pourfendre qu'à trois heures, ne me ferez-vous pas l’honneur de me traiter en ami jusque-là, et la grâce d’accepter le modeste dîner qu’en prévision de votre visite j’ai fait préparer ?"

Là-dessus, Capestang avoua qu'il avait grand appétit, et les deux adversaires étant passés dans une chambre voisine où se trouvait dressée une table magnifiquement servie, s’installèrent l’un en face de l’autre en attendant l’heure de se couper la gorge.

Le repas était succulent, les vins étaient nobles, les convives dignes l’un de l’autre : l’entretien fut étourdissant. Cinq-Mars raconta ses amours, et Capestang ses batailles. Mais il eut bien soin de ne pas avouer qu’il avait pu assister à une assemblée de conjurés à l’auberge de la Pie Voleuse, et que dans cette assemblée il avait été introduit par Cinq-Mars lui-même. Il se contenta de dire qu’il était venu à Paris dans l’intention de faire fortune, et Cinq-Mars l’assura que si tous deux sortaient sains et saufs de leur duel, il mettrait à son service l’influence dont il disposerait bientôt, surtout après son mariage.

"Car, ajouta-t-il avec un soupir, par les ordres de mon père et en vue de certaines combinaisons politiques, je dois me marier... j'ai une fiancée qu'on dit fort belle et que je ne connais pas, et que j'espère connaître le plus tard possible..."

Capestang, voyant le front de son hôte s’assombrir n’insista pas et se hâta de changer le cours de l’entretien. Bref, vers