Page:Zaccone - Éric le mendiant - Un clan breton, 1853 .djvu/123

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pourquoi elle avait souffert et pleuré, et imploré son Dieu, elle se redressa le visage rouge d’émotion, le sein palpitant, en s’écriant avec une sorte d’égarement :

— Mon père ! mon père ! j’aime !

— Vous aimez ?

— Un hôte de mon oncle.

— Un étranger ?

— Oui, mon père.

— Son nom.

— Hlodowig le Franc !…

À ce moment, et quoique les feuilles des arbres demeurassent immobiles et que le vent eût cessé de siffler, un frémissement singulier se fit derrière le dolmin. Pialla promena autour d’elle son regard épouvanté, et crut entrevoir une forme blanche s’élever à deux pas. Une sueur froide glaça ses membres, toutes les terreurs superstitieuses de son enfance se réveillèrent, et se mirent à tourner à ses côtés sous mille formes bizarres. Elle se jeta éperdue dans les bras du vieillard et lui montra la forme blanche qui disparaissait derrière les arbres :

— Mon enfant, lui dit le druide, vous vous effrayez de vaines ombres que la lune chasse devant elle — l’amour est venu à vous, il ne faut pas craindre et trembler ainsi. À votre âge, et dans la société où le sort vous a placée, l’amour est une douce compagne à laquelle vous devez faire bon accueil, et votre dieu, quel qu’il soit, ne saurait voir ce sentiment d’un regard de colère. Vous êtes jeune et candide, ô Pialla, jamais le vent terrible des passions mauvaises n’a soufflé sur vous, et quand viendra le jour sacré de la transformation, aussi belle qu’au sortir des mains des dieux, votre âme revêtira la forme de quelque création plus épurée. Tout se tient dans ce cercle et les autres, et celui que vous aimez sur cette terre est