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Page:Zaccone - Éric le mendiant - Un clan breton, 1853 .djvu/45

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ÉRIC LE MENDIANT.

Le plus âgé était un grand gaillard aux allures vives et décidées, qui portait hardiment son chapeau de feutre sur l’oreille, et dont le visage rayonnait de gaieté et de bonne humeur.

Le plus jeune, au contraire, était petit, quoique bien pris dans sa taille ; une extrême pâleur était répandue sur ses joues, et une certaine teinte de mélancolie attristait ses traits.

Ils cheminaient l’un à côté de l’autre sans échanger la moindre parole.

Du reste la route était déserte, quelques gouttes de pluie commençaient à tomber, et l’on entendait du sentier ce bruit tourmenté qui s’élève des flots que le flux et le reflux agitent incessamment.

La situation prêtait peu à la conversation.

L’aspect de la rade était sans charmes, et avec le vent et la pluie, cinq lieues à faire n’étaient certainement pas chose bien attrayante.

Toutefois, le plus âgé des deux voyageurs sembla penser autrement, car après quelques minutes de silence il se tourna brusquement vers son compagnon, et arrêta son cheval en poussant un éclat de rire qu’aucun écho ne lui renvoya.

— Ah çà ! mon cher Octave, dit-il avec un accent de brusquerie de bon aloi, je ne vous trouve guère charmant ce jourd’hui ; et si j’avais prévu le cas où vous deviendriez aussi monotone, je me serais bien gardé de quitter notre chère capitale pour vous suivre dans ce pays qui, s’il ne manque pas de pittoresque, manque essentiellement de lune et de soleil.

— Vous aimez donc, bien le soleil ? repartit ironiquement son compagnon.

— Vrai Dieu, mon ami, s’écria le plus âgé d’un certain ton enthousiaste qui avait sa séduction, j’ai vécu dix ans de mes plus belles années dans un affreux taudis de l’une des plus horribles rues de Paris ;