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PRÉLIMINAIRE.

me permit pas d’attendre que les promesses des personnes qui s’interessoient à l’exécution de mon plan, se réalisassent. J’étois d’ailleurs résolu, pour n’être pas exposé aux reproches en cas de mauvais succès, de ne devoir qu’à moi-même une entreprise de cette nature ; & l’équité ne souffroit pas que j’exigeasse de ma famille, peu favorisée des biens de la fortune, des secours qui pouvoient paroître plus que hasardés.

Dans ces dispositions, sûr de la force de mon tempéramment, & exercé depuis plusieurs années à une vie austère, aux veilles, à la sobriété, l’état de Soldat de la Compagnie des Indes me parut le seul que les circonstances me permissent d’embrasser. J’allai en consequence trouver M. Boucher, Officier chargé de former les Recrues que l’on envoyoit dans l’Inde, et après quelques momens de conversation sur l’Histoire du Païs & sur les affaires de la Côte de Coromandelle, je lui déclarai nettement l’objet de ma visite. Ma proposition le surprit ; il me représenta fortement & avec une sorte de tendresse, à quoi je voulois m’engager, & me remit à quatre jours, comptant que ce délai me feroit changer de résolution. Il est difficile d’exprimer ce qui se passa chez moi pendant cet intervalle. J’allai au bout des quatre jours revoir M. Boucher ; mon courage triompha de ses objections : & voyant que c’étoit un parti pris, il reçut mon engagement, avec promesse positive de n’en parler qu’après mon depart.

J’employai le peu de tems qui le précéda, à former, sans que mes parens s’en apperçussent, mon petit équipage, qui consistoit en deux chemises, deux mouchoirs & une paire de bas. Je grossis le paquet d’un étui de Mathématiques, de la Bible Hébraïque de Leufden, de Montagne, de Charron ; & la veille du jour auquel je devois quitter Paris, j’envoyai chercher mon frere, celui qui est actuellement Chef du Comptoir François de Surate. Quelle entrevûe ! Je ne puis y penser sans frémir. Le billet que je lui avois écrit, lui marquoit en deux mots ce dont il s’agissoit. J’eus besoin d’une force plus qu’humaine pour dévorer son chagrin & le mien. M. Boucher me laissa en sa présence maî-