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LE BOUTE-CHARGE

serons entraînés, quels héroïsmes éclateront au grand jour dans la mêlée, sabres contre sabres.

Dois-je avouer toute la vérité ? Il me semble parfois que j’ai peur.

Mais cela disparaît en songeant à eux.

Où sont-ils ? Combien sont-ils ? Notre pensée, maintenant, est toute pleine d’eux seuls. Eux : l’adversaire implacable, l’ennemi héréditaire, la race qui depuis les siècles reculés des invasions barbares se choque à notre race, brutale, menaçante. Ce sont ceux qui demain vont présenter à nos lames leurs poitrines et leurs visages velus, uhlans, leur lance en arrêt, housards de la mort aux chevaux noirs, lugubre parodie vivante, cuirassiers blancs superbes et insolents.

Des groupes se forment, s’animent, s’interrogent. La fatigue des longues marches exécutées dans la journée, on n’y pense plus ; le froid, on ne le sent pas. On entoure les cavaliers qui, le matin, faisaient partie de la pointe d’avant-garde, qui ont chargé les premiers