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LE BOUTE-CHARGE

Ainsi, au besoin, le régiment se fait instituteur. Et quel instituteur ! Ce n’est plus à des enfants qu’il s’adresse ; ce n’est plus à des bambins dont il est facile d’ouvrir et de diriger l’intelligence : c’est à des jeunes gens formés dont le cerveau a reçu le pli profond et souvent ineffaçable de l’ignorance, qui viennent à l’école fatigués déjà par le cheval, les exercices et les théories. Et c’est un spectacle touchant que de voir ces grands gaillards à moustaches, au teint basané, la pipe à la bouche, rassemblés autour de la table, penchés sur les alphabets, avec de grosses gouttes de sueur au front et balbutiant Ba… Be… Bi… Bo… Bu… de leur voix enrouée.

Marc s’appliquait éperdument ; le soir il emportait son cahier, et à la lueur d’une chandelle plantée sur son quart renversé, allongeait bâtons et jambages, épelait le Règlement sur le service intérieur.

C’était une grosse besogne. Si son corps avait la souplesse et l’élégance d’un beau gars solidement planté, si son âme s’ouvrait volon-