Page:Zevort - Romans grecs 2.djvu/24

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ment, me laissa et partit. Il ne fallut que cette seule nuit à la misérable pour ourdir contre moi un projet de vengeance qu’elle mit aussitôt à exécution. D’abord elle ne se leva pas de son lit le matin, et, quand mon père, à son retour, lui en demanda la raison, elle feignit d’être malade, sans vouloir répondre autre chose. Comme il insistait et lui demandait itérativement ce qu’elle avait : « Ce jeune homme, dit-elle, si charmant, même à mon égard, votre fils et le mien, celui que souvent j’ai aimé plus que vous-même, les Dieux m’en soient témoins ! il a découvert à certains indices que j’étais enceinte, chose que je vous avais cachée jusqu’à présent, afin d’attendre que j’eusse une entière certitude ; il a épié le moment de votre absence ; et, comme je lui adressais les conseils qu’on a coutume de donner aux jeunes gens, l’exhortant à vivre sagement, à ne point s’abandonner aux courtisanes et à l’ivresse (car j’ai découvert que telle est sa conduite, quoique je ne vous en aie rien dit, pour ne point paraître marâtre), il a profité du moment où je l’entretenais seul à seul, pour ménager sa susceptibilité, et s’est porté envers vous et envers moi à mille outrages que je rougirais de raconter ; sachez seulement qu’il m’a sauté à deux pieds sur le ventre et m’a mise dans l’état où vous me voyez. »

XI. » À ce récit, mon père ne suppose pas un instant qu’elle puisse mentir, elle si bien disposée à mon égard : sans rien dire, sans m’interroger, sans me mettre en demeure de me justifier, il accourt aussitôt dans l’état où il se trouve, et, ne rencontrant dans un coin de la maison, il m’assomme de coups de poing avant toute explication ; puis il appelle ses esclaves et me fait fouetter, sans même que je puisse deviner, ce qui est le moins en pareil cas, pourquoi je suis battu. Lorsque sa colère fut assouvie : « Maintenant, du moins, lui dis-je, puisque vous ne l’avez pas fait plus tôt, il serait juste, mon père, de m’apprendre le motif de ces coups. »