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Page:Zo d'Axa - Les feuilles.djvu/14

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honneur, salut-public — retentirent dans tous les clans, sous les bannières opposées. On joue des mots racoleurs. C’est une musique militaire, un chant d’église, des couplets variés de réunion publique. Les hommes qu’on n’embrigade pas font fi des mots raccrocheurs.

Sans prendre service dans les camps, ils gardent dans la mêlée la loyauté passionnée du mot juste et du coup précis. Tel état-major plus que tel autre n’a pas à compter sur eux. Ils méprisent les diplomaties, les tactiques, les réticences. Ils sont suspects : dans chaque camp, volontiers, on les traiterait en francs-tireurs. Ils laissent à d’autres la solde, les galons et de nouveaux mensonges.

C’est mentir que promettre encore après tant de promesses déjà. Les prophètes et les pontifes, les prêcheurs, les utopistes nous bernent en nous montrant, dans le lointain, des temps d’amour. Nous serons morts : la terre promise est celle où nous pourrirons. À quel titre, pour quels motifs, s’hypnotiser sur l’avenir ? Assez de mirages ! Nous voulons — et par tous les moyens possibles — irrespectueux par nature et des lois et des préjugés, nous voulons — immédiatement — conquérir tout ce que la vie porte en elle de fruits et de fleurs. Si plus tard une révolution résulte des efforts épars — tant mieux ! ce sera la bonne. Impatients, nous l’aurons devancée…