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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/151

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SŒUR-DES-PAUVRES

vent écartait. Un peu fière d’être riche, elle serrait bien fort son beau sou neuf et choisissait du regard le jouet qu’elle allait acheter. Enfin elle se décida pour une poupée qui avait des cheveux comme une grande personne ; cette poupée, qui était bien haute comme elle, portait une robe de soie blanche, pareille à celle de la sainte Vierge.

La fillette avança de quelques pas. Honteuse, comme elle regardait autour d’elle, avant d’entrer, elle aperçut sur un banc de pierre, en face de la belle boutique, une femme mal vêtue, berçant dans ses bras un enfant qui pleurait. Elle s’arrêta de nouveau, tournant le dos à la poupée. Aux cris de l’enfant, ses mains se croisèrent de pitié ; et, sans honte cette fois, elle s’approcha rapidement pour donner son beau sou neuf à la pauvre femme.

Cette dernière, depuis quelques instants, regardait Sœur-des-Pauvres. Elle l’avait vue s’arrêter, puis s’avancer vers les jouets ; de sorte que, lorsque l’enfant vint à elle, elle comprit son bon cœur. Elle prit le sou, les yeux humides ; puis, elle retint dans la sienne la petite main qui le lui donnait.

― Ma fille, dit-elle, j’accepte ton aumône, parce que je vois bien qu’un refus te chagrinerait. Mais, toi-même, ne désires-tu rien ? Toute mal vêtue que je suis, je puis contenter un de tes vœux.

Pendant qu’elle parlait ainsi, les yeux de la pauvresse brillaient, pareils à des étoiles, tandis que, autour de sa tête, courait une flamme, comme une couronne faite