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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/213

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ET DU PETIT MÉDÉRIC

fond de leur culotte, et ne lève la main que sur trois ou quatre douzaines au moins. Oh la la ! quelles calottes, quelles bourrades, quels triomphants coups de pied !

Et Médéric s’extasiait, se tournait en tous sens, ne trouvant pas d’exclamations assez fortes pour peindre son ravissement. À la vérité, Sidoine n’en frappait ni plus fort ni plus vite. Il avait pris au début un petit train bonhomme, et continuait la besogne avec flegme, sans accélérer le mouvement. Il surveillait seulement les bords de l’armée, et, lorsqu’il apercevait quelque fuyard, il se contentait de le ramener à son poste d’une chiquenaude, pour qu’il eût sa part au festin, quand viendrait son tour. Au bout d’un quart d’heure d’une pareille tactique, les Verts se trouvaient tous couchés proprement dans la plaine, sans qu’un seul restât debout pour aller porter au reste de la nation la nouvelle de leur défaite ; circonstance rare et affligeante, qui ne s’est pas reproduite depuis dans l’histoire du monde.

Médéric n’aimait pas à voir le sang versé. Quand tout fut terminé :

— Mon mignon, dit-il à Sidoine, puisque tu as anéanti cette armée, il me semble juste que tu l’enterres.

Sidoine, ayant regardé autour de lui, aperçut cinq ou six buttes de sable qui se trouvaient là, il les poussa sur le champ de bataille, à l’aide de vigoureux coups de pied, et les aplanit de la main, de manière à en faire