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AVENTURES DU GRAND SIDOINE

nèrent profondément. Il se décida à poser une question.

— Mon frère Médéric, demanda-t-il, voici un peuple qui me fait désirer de t’entendre vulgariser l’histoire. Certainement cet empire doit tenir une large place dans les annales des hommes ?

— Mon mignon, répondit Médéric, puisque tu ne peux te lasser de t’instruire, je veux bien te faire en peu de mots un cours d’histoire universelle. Ma méthode est fort simple, et je compte l’appliquer tout au long, un de ces jours. Elle repose sur le néant de l’homme. Lorsque l’historien interroge les siècles, il voit les sociétés, parties de la naïveté première, s’élever jusqu’à la plus haute civilisation, puis retomber de nouveau dans l’antique barbarie. Ainsi, les empires se succèdent, en s’écroulant tour à tour ; chaque fois qu’un peuple se croit parvenu à la suprême science, cette science elle-même cause sa ruine, et le monde est ramené à son ignorance native. Au commencement des temps, l’Égypte bâtit ses pyramides et borde le Nil de ses cités ; dans l’ombre de ses temples, elle résout les grands problèmes dont l’humanité cherche encore aujourd’hui les solutions ; la première, elle a l’idée de l’unité de Dieu et de l’immortalité de l’âme ; puis elle meurt, au soir des fêtes de Cléopâtre, et emporte avec elle les secrets de dix-huit siècles. La Grèce sourit alors, parfumée et mélodieuse ; son nom nous parvient mêlé à des cris de liberté et à des chants sublimes ; elle peuple le ciel de ses rêves et divinise le marbre de son