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AVENTURES DU GRAND SIDOINE

— Marchons toujours, mon mignon, répondit Médéric. Il nous faut connaître notre royaume. Le pays me paraît paisible, et nous y dormirons, je crois, nos grasses matinées. Ce soir, nous nous reposerons.

Les deux voyageurs traversaient les villes et les campagnes, regardant autour d’eux. La terre les avait attristés, et ils trouvaient un délassement dans les purs horizons et les foules silencieuses de ce coin perdu de l’univers. Je l’ai dit, le Royaume des Heureux n’était pas un paradis aux ruisseaux de lait et de miel, mais une contrée de clarté douce et de sainte tranquillité.

Médéric comprit l’admirable équilibre de ce royaume. Un rayon de moins, et la nuit eût été faite ; un rayon de plus, et la lumière aurait blessé les yeux. Il se dit que là devait être la sagesse, où l’homme consentait à se mesurer le bien comme le mal, à accepter sa condition sous le ciel, sans se révolter par ses dévouements ou par ses crimes.

Comme ils avançaient, lui et son compagnon, ils trouvèrent, au milieu d’un champ, un hangar fermé de grilles. Médéric reconnut l’école modèle fondée par l’aimable Primevère, pour ses chers animaux. Depuis longtemps il désirait connaître les suites de cet essai de perfectibilité. Il fit coucher Sidoine au pied du mur, et tous deux, appuyant leurs fronts aux barreaux, ils purent contempler et suivre dans ses détails une scène étrange qui acheva leur éducation.

Au premier regard, ils ne surent quelles créatures