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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/307

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ET DU PETIT MÉDÉRIC

bizarres ils avaient devant eux. Trois mois de caresses, d’enseignement mutuel et de régime frugal avaient mis les pauvres bêtes sur les dents. Les lions, pelés et galeux, semblaient d’énormes chats de gouttière ; les loups portaient la tête basse, plus maigres et plus honteux que des chiens errants ; quant aux autres bêtes de complexion plus délicate, elles gisaient pêle-mêle sur le sol, n’offrant à la vue que des côtes saillantes et des museaux allongés. Les oiseaux et les insectes étaient encore moins reconnaissables, ayant perdu les belles couleurs de leurs ajustements. Tous ces êtres misérables tremblaient de faim et de froid, n’étant plus ce que Dieu les avait créés, mais se trouvant d’ailleurs parfaitement civilisés.

Médéric et Sidoine, peu à peu, finirent par reconnaître les différents animaux. Malgré leur respect du progrès et des bienfaits de l’instruction, ils ne purent s’empêcher de plaindre ces victimes du bien. Il y a tristesse à voir la création s’amoindrir.

Cependant, les bêtes de l’école modèle se traînèrent en gémissant au centre du hangar et se rangèrent en cercle. Elles allaient tenir conseil.

Un lion, comme ayant gardé le plus de souffle, porta le premier la parole.

— Mes amis, dit-il, notre plus cher désir, à nous tous qui avons le bonheur d’être enfermés ici, est de persévérer dans l’excellente voie de fraternité et de perfection que nous suivons avec des résultats si remarquables.