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SIMPLICE

taine ombragée de ses rameaux les plus touffus. Là, dans le silence et dans l’ombre, Fleur-des-eaux rayonnait au milieu de ses sœurs. Paresseuse, elle s’abandonnait au courant, ses petits pieds demi-voilés par les flots, sa tête blonde couronnée de perles liquides. Son sourire faisait les délices des nénuphars et des glaïeuls. Elle était l’âme de la forêt.

Elle vivait insoucieuse, ne connaissant de la terre que sa mère, la rosée, et du ciel que le rayon, son père. Elle se sentait aimée du flot qui la berçait, de la branche qui lui donnait son ombre. Elle avait mille amoureux et pas un amant.

Fleur-des-eaux n’ignorait pas qu’elle devait mourir d’amour ; elle se plaisait dans cette pensée, et vivait en espérant la mort. Souriante, elle attendait le bien-aimé.

Une nuit, à la clarté des étoiles, Simplice l’avait vue au détour d’une allée. Il la chercha pendant un long mois, pensant la rencontrer derrière chaque tronc d’arbre. Il croyait toujours la voir glisser dans les taillis, et ne trouvait, en accourant, que les grandes ombres des peupliers agités par les souffles du ciel.


VII

La forêt se taisait maintenant ; elle se défiait de Simplice. Elle épaississait son feuillage et jetait toute