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Page:Zola - Contes à Ninon, 1864.djvu/36

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26
SIMPLICE

Et toute la forêt reprit :

— Arrête, Simplice, un baiser doit la tuer, ne donne pas ce baiser. Ne le sais-tu pas ? la brise du soir, notre messagère, ne te l’a-t-elle pas dit ? Fleur-des-eaux est la fleur céleste dont le parfum donne la mort. Hélas ! la pauvrette, sa destinée est étrange. Pitié pour elle, Simplice, ne bois pas son âme sur ses lèvres.


IX

Fleur-des-eaux se tourna et vit Simplice. Elle sourit et lui fit signe d’approcher, en disant à la forêt :

— Voici venir le bien-aimé.

Il y avait trois jours, trois heures, trois minutes, que le prince poursuivait l’ondine. Les paroles des chênes vibraient encore derrière lui ; il fut tenté de s’enfuir.

Fleur-des-eaux lui pressait déjà les mains. Elle se dressait sur ses petits pieds, et mirait son sourire dans les yeux du jeune homme.

— Tu as bien tardé, dit-elle. Mon cœur te savait dans la forêt. J’ai monté sur un rayon de lune et je t’ai cherché trois jours, trois heures, trois minutes. Simplice se taisait et retenait son souffle. Elle le fit asseoir au bord de la fontaine ; elle le caressait du regard ; et lui, il la contemplait longuement.

— Ne me reconnais-tu pas ? reprit-elle. Je t’ai vu souvent en rêve. J’allais à toi, tu me prenais la main,