Page:Zola - Fécondité.djvu/112

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
103
LES QUATRE ÉVANGILES

sa gorge, l’odeur de sa peaufine et de ses lourds cheveux. La maternité, au lieu d’être, chez elle, destructive, lui avait donné une plénitude de formes, une solidité ferme de membres, toute cette beauté éclatante de la mère, qui fait de la beauté hésitante, équivoque de la vierge, un néant.

Mathieu, d’une étreinte passionnée, reprit Marianne entre ses bras.

— Ah ! chère femme, j’ai douté de nous… Ni moi ni toi ne dormirons, tant que tu ne m’auras pas pardonné.

Elle eut un doux rire, déjà consolée, s’abandonnant à cette tendresse, dont elle avait senti monter la victorieuse flamme.

— Oh ! moi, je n’ai pas douté, je savais bien que tu allais me reprendre.

Et ce fut un long baiser d’amour, sur l’invitation de l’amoureuse, de la féconde nuit de printemps, qui entrait toute par la fenêtre, avec ses étoiles palpitantes, avec ses eaux, ses forêts, ses campagnes pâmées. La sève de la terre montait, procréait dans l’ombre, embaumée d’une odeur de vivante ivresse. C’était le ruissellement des germes, charriés sans fin par les mondes. C’était le frisson d’accouplement des milliards d’êtres, le spasme universel de fécondation, la conception nécessaire, continue de la vie qui donne la vie. Et toute la nature, une fois encore, voulut ainsi qu’un être de plus fût conçu.

Mais Marianne avait arrêté Mathieu d’un geste, se soulevant, prêtant de nouveau l’oreille du côté de la chambre des enfants.

— Écoute donc !

Tous deux écoutèrent, se penchèrent, retinrent leur respiration.

— Tu crois qu’ils se réveillent ?