Page:Zola - Fécondité.djvu/140

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— Non, Madame, ce sont les personnes que vous attendez, monsieur et madame Froment.

— Faites entrer… Dès que Monsieur sera là, prévenez-moi.

Et, lorsque Marianne et Mathieu furent introduits, elle se souleva, tendit les deux mains avec amabilité, en disant :

— Vous m’excusez, chère madame, d’avoir insisté, pour que ce fût vous qui prissiez la peine de venir à moi ; mais, vous le voyez, je ne pouvais aller à vous, et notre bon docteur Boutan m’avait dit combien vous étiez solide et vaillante… Que vous êtes aimable d’avoir accepté mon déjeuner ! J’avais une si grosse envie de vous voir, de causer un peu ! Tenez, mettez-vous dans ce fauteuil, là, tout près de moi.

Mathieu la regardait, s’étonnait de la trouver si jaunie, dévastée, elle qu’il avait vue délicieuse, dans sa beauté blonde ; tandis qu’elle-même dévisageait anxieusement Marianne, frappée de son air tranquille et fort, de la limpidité souriante que gardaient ses grands yeux clairs.

— C’est moi qui vous remercie de votre invitation, répliquait obligeamment celle-ci. L’exercice me fait grand bien, j’ai eu le plaisir de pouvoir venir à pied… Oh ! si vous le vouliez, vous marcheriez comme moi, il ne s’agit que d’avoir du courage.

Dès lors, une conversation intime s’engagea entre elles deux, pendant que Mathieu ouvrait le livre resté sur une petite table, afin de les mettre à l’aise, en leur faisant croire qu’il ne les écoutait même pas. Elles ne s’étaient vues que rarement, sans rien de commun, ni les idées, ni les habitudes ; mais leur situation semblable les rapprochait. Et c’était surtout, de la part de Valentine un si grand désir de savoir, d’être renseignée, d’être rassurée ! Elle parla d’abord du docteur Boutan, voulant qu’on lui redise qu’il ne perdait jamais une de ses clientes, qu’il