Page:Zola - Fécondité.djvu/153

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Mais il fut interrompu par une autre visite. La baronne de Lowicz faisait demander des nouvelles de Madame. Et, quand on l’eut priée de monter, elle courut à Valentine, l’embrassa, en s’écriant  :

— Je ne voulais pas vous déranger, ma chère. Enfin, je suis pourtant bien heureuse de vous voir et de vous dire que je vous plains de tout mon cœur.

Elle tombait d’ailleurs, comme elle l’ajouta, en pays de connaissance, et elle distribua des poignées de main à tout le monde. Il parut à Mathieu que celle qu’elle lui donnait était particulièrement significative, rude et courte, accompagnée du sourire de moquerie aiguë dont elle le poursuivait, depuis qu’il l’avait refusée. Et, clairement, son visage exprima l’ironie profonde qui avait passé déjà sur celui de Santerre, dès qu’elle eut jeté un double coup d’œil sur les deux femmes enceintes, réunies là, en petite fête. Ce spectacle sembla l’amuser prodigieusement, pendant qu’elle se redressait, dans sa beauté provocante, avec sa taille mince, son grand corps ardent et souple. Jamais elle n’avait vécu une vie de plus libre jouissance, sans autre contrainte que celle de rester une des femmes du monde les mieux reçues, les plus fêtées de Paris.

Elle complimenta Marianne, sa cousine.

— Eh bien  ! ma chère, vous devez être heureuse voilà le cinquième presque fait, et vous allez pouvoir songer au sixième… Mais non, je vous assure, je ne me moque pas. Moi, je comprends que, lorsqu’on aime les enfants, on aille à la douzaine.

— Douze enfants, dit Marianne avec son tranquille sourire c’est bien mon compte, c’est le chiffre que je me suis fixé.

— Grand Dieu  ! gémit Valentine, je jure, moi, de n’en avoir jamais d’autre, si je ne meurs pas de celui-ci  !

Séguin, ricanant toujours, voulut reprendre, avec San-