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Page:Zola - Fécondité.djvu/252

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« Oh ! vois donc, vois donc ! »

Sous le grand chêne, elle avait installé M. Gervais dans sa voiture, parmi de folles herbes qui noyaient les roues. Et, tandis qu’elle préparait une petite timbale d’argent, pour le goûter, elle venait de remarquer que l’enfant, levant la tête, suivait sa main, où l’argent, frappé par le soleil, étincelait. Elle recommença l’expérience, et de nouveau l’enfant suivit des yeux l’étoile, dont l’éclat, pour la première fois, luisait dans l’aube trouble de sa vue.

« Ah ! on ne dira pas que je me trompe, que je me fais des idées ! Il voit clair maintenant, c’est bien sûr… Mon beau mignon, mon cher trésor ! »

Elle s’était jetée sur lui pour le baiser, dans la fête de ce premier regard. Et ce fut ensuite la joie du premier sourire.

« Et tiens, tiens ! dit à son tour Mathieu, qui s’était penché près d’elle, cédant au même ravissement, le voilà maintenant qui te sourit ! Parbleu ! dès que ça voit clair, ces petits hommes, ça se met à rire ! »

Elle-même éclata d’un grand rire.

« Tu as raison, il rit, il rit ! Ah ! qu’il est drôle, et que je suis contente ! » Et la mère, et le père riaient d’aise, riaient ensemble, devant ce rire de l’enfant, à peine sensible, fugitif, tel qu’un léger frisson sur l’eau pure d’une source.

Dans leur allégresse, Marianne rappela les quatre autres, qui bondissaient autour d’eux, parmi les jeunes feuillages.

« Allons, Rose ! allons, Ambroise ! allons, Blaise et Denis !… C’est l’heure, venez vite goûter. »

Ils accoururent, et la table fut mise sur une nappe de tendre gazon. Mathieu ayant décroché le panier pendu devant la petite voiture, la mère en tira les tartines, dont la distribution commença. Il y eut un gros silence,