Page:Zola - Fécondité.djvu/359

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impératrices inassouvies de la Rome ancienne, le déguisement d’une servante, pour battre les trottoirs des quartiers louches, en quête des mâles brutaux dont elle souhaitait les violences. Elle cherchait les monstres, il n’était pas d’accouplement trop rude, dont elle ne brûlât de connaître la déchirure. Et, naturellement, les dangers de grossesse croissaient encore, dans ces bordées frénétiques, avec des hommes ivres parfois, qui n’y mettaient aucune délicatesse.

Mathieu, un peu surpris d’abord de pareilles confidences, en vint à éprouver une sorte de pitié inquiète, comme devant une malade. Il eut, à son tour, un rire involontaire, en songeant à tous ces fraudeurs, à toutes ces fraudeuses, dont le monde était plein, et qui, malgré leurs efforts têtus pour duper la nature, finissaient quand même par en être les dupes.

« Vous étiez si certaine de prendre vos précautions ! dit-il avec quelque ironie. Vous ne savez donc plus ?

— Est-ce qu’on sait jamais ! cria-t-elle. Il y a aussi de tels maladroits, sans parler des circonstances. On ne peut pas toujours se garer. »

Puis, elle oublia qu’elle était une femme, il n’y eut plus là que deux hommes, causant librement. Et ce fut avec une audace superbe et farouche, où éclatait tout son désir insatiable, qu’elle ajouta hautement :

« D’ailleurs, ces fraudes je les ai en horreur et en mépris. Y a-t-il quelque chose de plus bas, de plus sot ? C’est tout l’amour amoindri, gâté, assassiné. Voyez-vous deux amants surveillant leur délire, n’ayant en tête que la préoccupation de ne pas s’aimer jusqu’au bout ! Autant vaut-il tout de suite se tourner le dos, ne rien commencer, puisqu’on ne finit rien. Moi, je déclare que j’en reste révoltée, enragée, et que je serais, chaque fois, pour le risque-tout, sans cette peur de me compromettre,