Page:Zola - Fécondité.djvu/426

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« Oh ! la pièce de Maindron, répondit-il, vous n’avez pas idée d’une platitude pareille ! Encore un adultère, c’est dégoûtant à la fin ! Il est incroyable que le public, mis à un tel régime, ne finisse pas par se révolter, et il faut vraiment que nos tristes psychologues, qui portent si lugubrement la vieille société en terre, aient achevé de la pourrir à jamais, pour qu’elle agonise ainsi dans la boue… Je n’ai pas changé, moi. La règle seule est souveraine, si l’on veut tuer le désir. C’est Dieu qui, pour le bonheur final, anéantira le monde. »

Puis, comme il s’aperçut que Mathieu le regardait avec stupeur, en se souvenant sans doute de son ancien rôle de romancier en habit noir, menant la danse, enterrant ce beau monde, qu’il exploitait, il se contenta de couper court, en ajoutant :

« Je me suis enfui du théâtre… Il fait beau, j’ai une voiture venez-vous aux Pastellistes avec moi ?

— Ah ! non, mon cher, pas moi du moins, dit Séguin de son air détaché. Les Pastellistes, ça m’assomme… Voyez si Valentine est libre. »

Et le geste qui accompagnait cette parole, donnait la femme, dans une de ces confiances de mari, résolues à ne rien savoir. Dix fois, il avait failli tuer Valentine, enragé d’abominables jalousies, l’accusant de trahisons immondes. Puis, sans qu’il y eût une explication raisonnable possible, sans logique, il lui avait toujours toléré Santerre : celui-là, sans doute, ne comptait pas ; ou, du moins, si le mari avait longtemps ignoré des rapports probables, il s’était accommodé plus tard du fait accompli. Et surtout, depuis qu’il avait eu la belle idée de ramener l’amant dans la maison, pour y vivre librement lui-même, il l’y laissait venir à chaque heure, s’y installer, sortir avec la femme, rentrer avec elle, en bonne camaraderie tous les trois, riant, discutant comme jadis, d’une élégance exaspérée et désenchantée.