Page:Zola - Fécondité.djvu/665

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par terre pour mettre à la place la vaste minoterie blanche, aux géantes meules toutes neuves, dont rêvait leur ambition de conquête.

Alors, pendant les années qui suivirent, Mathieu et Marianne virent encore d’autres départs. Ce fut le tour des trois filles, de Louise, de Madeleine et de Marguerite, à prendre successivement leur vol, hors du nid familial. Toutes trois se marièrent dans le pays. Louise, qui était la gaieté et la santé, une grosse brune aux cheveux lourds, aux grands yeux rieurs, épousa le notaire Mazaud de Janville, petit homme calme, réfléchi, dont les rares sourires silencieux disaient seuls la parfaite satisfaction de s’être mis en ménage avec une si joyeuse personne. Puis, Madeleine, une châtaine dorée, plus fluette, d’une beauté rêveuse, affinée par des goûts délicats de musicienne, fit un mariage d’amour, tout un roman, avec l’architecte Herbette, déjà célèbre, bel homme élégant qui possédait, près de Monval, un coin de parc, où il venait se reposer de ses grands travaux de Paris. Puis, Marguerite, la moins jolie des trois, laide même, mais d’un charme d’infinie bonté, fut choisie par le docteur Chambouvet, un fort gaillard jovial et tendre, établi à Vieux-Bourg, ayant hérité là du cabinet de son père, toute une vaste maison blanche qui était devenue la maison des pauvres. Et, les trois filles mariées, il ne resta donc, avec Mathieu et Marianne, dans le nid qui se vidait ainsi peu à peu, que les deux derniers garçons, Nicolas et Benjamin.

Cependant, à mesure que les chers petits s’étaient envolés, d’autres petits avaient poussé d’eux, un pullulement qu’élargissaient sans cesse les multiples mariages. À l’usine, où il régnait, Denis venait d’avoir, en huit ans bientôt, trois enfants, deux garçons, Lucien, Paul, une fille, Hortense. Tout en conquérant le haut commerce, Ambroise avait trouvé le temps de donner à son Léonce un petit frère, Charles, et deux petites sœurs, Pauline,