Page:Zola - Fécondité.djvu/715

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cloîtrée dans un couvent d’ursulines. Aussi Valentine, restée seule, s’ennuyant, ne pouvant plus mener le train de vie nécessaire, avait-elle à son tour quitté l’hôtel, pour un petit appartement très gai, très élégant du boulevard Malesherbes, où elle achevait sa vie mondaine, en vieille dame dévote et toujours tendre, présidente de l’Oeuvre des layettes, uniquement occupée des enfants des autres, depuis qu’elle n’avait pas su garder les siens. Et Ambroise n’avait eu qu’à prendre l’hôtel vide, criblé d’hypothèques, à ce point que, lorsque la succession de Séguin s’ouvrirait, ce seraient sûrement les héritiers, Valentine, Gaston et Lucie, qui lui devraient de l’argent.

Mais quel éveil encore des souvenirs, lorsque Mathieu, accompagné de Denis, entra dans cet hôtel royal de l’avenue d’Antin ! Ici, comme à l’usine, il se revoyait venir en pauvre homme, en locataire besogneux qui réclamait la réparation d’un toit, pour que l’eau du ciel n’inondât plus les quatre enfants déjà, dont son imprévoyance coupable avait accepté la charge. Et c’était bien, sur l’avenue, la somptueuse façade Renaissance, aux deux étages de huit hautes fenêtres ; c’était le vestibule de bronze et de marbre desservant les vastes salons du rez-de-chaussée, que prolongeait le jardin d’hiver ; c’était surtout, occupant tout le centre du premier étage, l’ancien cabinet de Séguin, l’immense pièce éclairée par une verrière, faite d’anciens vitraux. Cette pièce, il évoquait avec son amusante profusion d’antiquailles, vieilles étoffes, orfèvreries, faïences, avec ses riches reliures et ses fameux étains modernes. Il l’évoquait, plus tard, dans l’abandon où elle était tombée, l’air de ruine désastreuse qu’elle avait pris, grise de poussière, disant la mort lente de la maison. Et il la retrouvait superbe, heureuse, rétablie en un luxe plus solide et plus sain par Ambroise, qui, pendant trois mois, avait mis là des maçons, des