Page:Zola - Fécondité.djvu/716

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menuisiers, des tapissiers. Maintenant, l’hôtel entier revivait, plus luxueux encore, empli l’hiver d’un bruit de fêtes, égayé du rire des quatre enfants, de l’éclat de cette fortune vivante que renouvelait sans cesse l’effort de la conquête. Et ce n’était plus Séguin l’oisif, l’ouvrier de néant, que Mathieu venait y voir, c’était son fils Ambroise, d’énergie créatrice, dont les forces de la vie elles-mêmes avaient voulu la victoire, en le faisant triompher là, en maître, dans cette maison du vaincu.

Ambroise, qui était sorti, ne devait rentrer que pour le déjeuner.

Mathieu et Denis l’attendirent ; et, comme le premier retraversait l’antichambre, désireux de se rendre compte de l’aménagement nouveau, il fut surpris d’y être arrêté par une dame, installée patiemment, à laquelle il n’avait d’abord prêté aucune attention.

« Je vois que monsieur Froment ne me reconnaît pas. »

Il eut un geste vague. Elle était forte et grasse, avait sûrement dépassé la soixantaine, mais soignée, riante, avec une longue face pleine que de respectables cheveux blancs encadraient. On aurait dit une bonne bourgeoise de province, cossue, en toilette de cérémonie.

« Céleste… Céleste, l’ancienne femme de chambre de Mme  Séguin. »

Alors, il la reconnut parfaitement, en cachant sa stupeur d’une fin si heureuse. Il la croyait au fond de quelque égout. Et, placide, l’air gai, elle raconta son bonheur.

« Oh ! je suis très contente… Je m’étais retirée à Rougemont, mon pays, j’ai fini par y épouser un ancien marin, un officier en retraite, qui a une jolie pension, sans compter une petite fortune que lui laissée sa première femme. Et, comme il a deux grands fils, je m’étais permis de recommander le cadet à M. Ambroise, pour qu’il veuille bien le prendre dans sa maison de commerce, ce qu’il a eu la bonté de faire… Alors, n’est-ce