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LES ROUGON-MACQUART.

Le jour baissa brusquement, la Maheude alluma la lampe, irritée de ce que ni la fille ni les garçons ne rentraient. Elle l’aurait parié : jamais on ne parvenait à faire ensemble l’unique repas où l’on aurait pu être tous autour de la table. Puis, c’était la salade de pissenlits qu’elle attendait. Qu’est-ce qu’il pouvait cueillir à cette heure, dans ce noir de four, le bougre d’enfant ! Une salade accompagnerait si bien la ratatouille qu’elle laissait mijoter sur le feu, des pommes de terre, des poireaux, de l’oseille, fricassés avec de l’oignon frit ! La maison entière le sentait, l’oignon frit, cette bonne odeur qui rancit vite et qui pénètre les briques des corons d’un empoisonnement tel, qu’on les flaire de loin dans la campagne, à ce violent fumet de cuisine pauvre.

Maheu, quand il quitta le jardin, à la nuit tombée, s’assoupit tout de suite sur une chaise, la tête contre la muraille. Dès qu’il s’asseyait, le soir, il dormait. Le coucou sonnait sept heures, Henri et Lénore venaient de casser une assiette en s’obstinant à aider Alzire, qui mettait le couvert, lorsque le père Bonnemort rentra le premier, pressé de dîner et de retourner à la fosse. Alors, la Maheude réveilla Maheu.

— Mangeons, tant pis !… Ils sont assez grands pour retrouver la maison. L’embêtant, c’est la salade !